Boutigny ► [Vidéo] La commune prépare l’inauguration d’une stèle à la mémoire des quatre soldats martiniquais tués par les Allemands en 1940

Boutigny prépare l’inauguration d’une stèle à la mémoire des quatre soldats martiniquais tués par les Allemands en 1940. L’événement aura lieu samedi 17 juin. Jeudi 4 mai, Daniel Aubart, adjoint au maire, a raconté l’histoire autour des quatre victimes fusillées au lieu-dit La Cantine.

La commune s’implique dans son devoir de mémoire et finalise l’aménagement près du rond point Jean-Jacques-Barbaux, au lieu-dit de la Cantine. L’espace sur la départementale 33 reliant Meaux à Coulommiers, aussi réservé au stationnement pour le co-voiturage, est devenu un lieu de commémoration de la dernière guerre et une stèle, qui sera inaugurée le 17 juin, y sera posée. C’est là qu’ont été fusillés par les Allemands, en 1940, quatre soldats martiniquais de passage qui avaient fait halte dans l’ancien relais de poste désaffecté.

L’adjoint au maire chargé du patrimoine et de la culture, Daniel Aubart, a fait les recherches historiques, et raconte : « On ne sait pas grand-chose sur l’événement tragique de ce jour-là. Personne n’a été témoin de l’assassinat des quatre soldats martiniquais. Clair Négrobar, sergent, et les soldats de deuxième classe, Appolinaire André Enione, Maurille Ernest Himmer et Frédéric Joseph Philibert, âgés de 26 à 29 ans, étaient rassemblés là, on ne sait pas pourquoi. Les deux premiers venaient du 3e régiment d’infanterie alpine, le troisième du 152e régiment d’infanterie coloniale, et le quatrième du 3e régiment d’infanterie coloniale. A cette période, la France était en pleine débâcle, c’était l’exode. Suzanne Biville tenait avec son mari, le café de la place de l’Eglise du village. Passant par là, le 17 juin, elle a trouvé les corps. Ils étaient à une cinquantaine de mètres de la maison et tombés à environ un mètre les uns des autres. Le mur derrière eux était marqué d’impacts de balles, ce qui laissait fortement à penser qu’ils avaient été alignés contre le mur et fusillés par l’ennemi. Chacune des dépouilles avait une balle dans la tête mais la poitrine de la quatrième avait à l’évidence reçu une rafale de mitraillette. Selon toute vraisemblance, ils ont été tués deux jours avant que Suzanne Biville ne les trouve. »

A l’intérieur de la maison, quatre verres et quatre assiettes témoignaient de la halte des soldats martiniquais et des traces de sang laissaient supposer qu’ils s’étaient battus avant d’être exécutés. Le 20 juin, les corps des soldats ont été enterrés à proximité de l’endroit de leur exécution, et en mars 1942, le conseil municipal a fait transférer les dépouilles dans un carré, au cimetière du village. Chaque année depuis, la mémoire des quatre militaires est honorée par la commune lors des commémorations du 11 novembre, liée à la guerre de 14-18, mais l’occasion aussi de se souvenir des Martiniquais tués dans la guerre suivante.


« Mon grand-père qui avait fait Verdun
préparait toujours un bouquet. »


Les anciens du village gardent en mémoire les cérémonies et l’incitation de leur instituteur de l’époque, Jean Anselme, pour qu’ils assistent à la cérémonie commémorative. Alain Opoix, agriculteur, témoigne : « Je suis allé à l’école à Boutigny de l’âge de 5 ans jusqu’à 14 ans, l’âge du certificat d’études. Chaque année, avec tous les enfants du village, je participais à la cérémonie qui se déroulait au monument aux morts, devant la mairie, et puis on allait au cimetière. On déposait des fleurs sur la tombe des soldats martiniquais. Leurs casques avaient été déposés sur le sol de la tombe. Mon grand-père qui avait fait Verdun [ndla : de février à décembre 1916] préparait toujours un bouquet. A la maison, on a toujours été sensibilisés à l’Histoire. C’est important qu’on se souvienne et qu’on rende hommage. Je serai à l’inauguration de la stèle, bien sûr. »

Dans les années 60, les corps des soldats ont été transférés dans la nécropole nationale de Fleury-les-Aubrais (Loiret), près d’Orléans. A Boutigny, le souvenir des Martiniquais a eu tendance à s’estomper, cependant, un regain d’intérêt initié par la municipalité et en particulier Daniel Aubart, a engendré des investigations jusqu’en Martinique pour retrouver les familles des soldats.

L’espace du mémorial à la Cantine a été aménagé avec une allée, du gazon et quatre cyprès qui symbolisent les quatre hommes.

(Voir notre article précédent : Boutigny ► « Honteux » : les cyprès commémorant la mort des soldats martiniquais ont été volés)