Communiqué de l’Association des maires d’Ile-de-France, mardi 23 juin –
La crise sanitaire a mis en lumière ce que nous, acteurs de terrain, savions déjà : l’égalité des chances est l’objectif premier de notre système éducatif , un objectif vers lequel tendent nos politiques publiques, un objectif donc, et non une réalité.
Malgré l’ensemble des mesures mises en œuvre par le gouvernement, malgré toute l’implication des professeurs et personnels de l’Education nationale, malgré la persévérance des parents d’élèves, malgré la mobilisation incontestable des maires, trop d’enfants ont été exclus de l’instruction pendant le confinement. Le sujet n’est pas de savoir si l’on aurait, collectivement, pu mieux faire. Le sujet est de regarder vers l’avenir et de résorber les inégalités qui se sont creusées pendant cette période. L’éducation est un droit ; mettre en œuvre l’accès à l’instruction est un devoir.
Nous ne pouvons que nous réjouir de la nécessité, affirmée par le président de la République, de faire revenir à l’école l’ensemble des enfants. Avec la volonté de garantir l’instruction de notre jeunesse, qui est notre avenir. Cependant, un objectif noble n’est bien servi qu’à travers des moyens suffisants. Nous entendons que le dispositif dit 2S-2C aurait vocation à être pérennisé à l’horizon de la rentrée de septembre 2020 si le contexte sanitaire le nécessite, et qu’il reviendrait donc aux collectivités locales, et en particulier s’agissant du primaire aux communes, de mettre en œuvre des activités sur le temps scolaire pour accueillir les élèves qui ne le seraient pas dans les écoles.
Malgré toute notre bonne volonté, nous pensons que cette politique qui peut trouver des réponses dans un contexte très urbain, disposant de nombreux lieux culturels et sportifs pouvant être mobilisés, n’est malheureusement pas applicable dans les communes rurales. Comme bien souvent, la théorie se heurte aux réalités du terrain : ainsi, les équipements qui pourraient accueillir les enfants sont quasi inexistants dans nos campagnes. Par ailleurs, les moyens alloués aux collectivités sont dérisoires et insuffisants pour nous permettre de recruter massivement des animateurs.
Aussi, nous tirons la sonnette d’alarme car, dans la mesure où certaines communes ne pourront accueillir les enfants non pris en charge par l’Education nationale, nous irions à la rentrée de septembre vers une rupture d’égalité s’agissant de l’instruction des enfants en fonction de leur territoire de résidence. Et cela, c’est inacceptable !
La prolongation de cette situation d’urgence à la rentrée de septembre impliquerait la refonte de notre système éducatif, alors même que le débat n’est pas clairement mis sur la table. En effet, les dispositifs d’animation des collectivités ne peuvent être considérés comme équivalents mais bien comme complémentaires avec l’instruction délivrée par des enseignants de l’Education nationale. Considérer qu’il est possible, sur du temps scolaire, de garder des enfants via un dispositif d’animation – même s’il a sans aucun doute des aspects pédagogiques via la culture, le sport, le rapport à la citoyenneté – revient à transformer le système éducatif, dans ses aspects les plus fondamentaux.
Si tel est le cas, si telle est la volonté de l’exécutif, cela ne pourra se faire sans que toutes les parties prenantes soient consultées, et que le débat soit clairement ouvert.
A ce jour, la compétence de l’instruction revient exclusivement à l’Etat sur le temps scolaire ; aussi, ce sont aux services de l’Etat de trouver le personnel suffisant de manière à assurer la prise en charge des enfants sur le temps scolaire à la rentrée de septembre, et non aux communes, qui n’en ont ni les compétences, ni les moyens financiers !
Par ailleurs, s’agissant de l’organisation des temps qui incombent aux communes, à savoir l’accueil extrascolaire et le périscolaire (dont la pause méridienne), l’exigence de non brassage de groupes d’élèves impose une organisation très consommatrice de personnel et contraint souvent à limiter les prestations au détriment des familles. Le protocole sanitaire imposé à l’Etat doit être assorti des moyens financiers permettant de le mettre en place tout en donnant aux familles le service public dont elles ont besoin.
Enfin, il est urgent d’avoir des perspectives s’agissant de la rentrée de septembre, qui doit se préparer dès maintenant. Nous devons préparer cette rentrée ensemble, avant les vacances d’été, pour qu’elle se passe le mieux possible, et pour donner des perspectives rassurantes, dès à présent.
Tous les enfants doivent pouvoir retourner à l’école, quel que soit le niveau de vie de leur famille, quel que soit leur territoire d’appartenance. Nous nous engageons à tout mettre en œuvre pour que ce soit possible, mais pour cela, nous avons besoin de l’Etat, et d’un vrai partenariat avec les collectivités locales, pour que les réalités du terrain soient prises en compte dans des politiques qui restent trop ascendantes et trop déconnectées des besoins locaux. Pour que dès demain, nous allions collectivement vers une école dont l’objectif est celui de l’égalité des chances, pour tous, et partout.