Le maire de Saint-Pathus, Jean-Benoît Pinturier, a été agressé par des gens du voyage, jeudi 5 octobre, devant l’ancien Carrefour Contact fermé depuis le 30 septembre.
Il était aux environs de 19 heures quand les caravanes de gens du voyage ont débarqué pour s’installer sur le parking du magasin Carrefour Contact dans la zone d’activité Noëfort. Le maire est rapidement arrivé sur place pour tenter de les faire renoncer à l’emplacement qui appartient à un propriétaire privé, et bien qu’il ait essayé de se mettre en travers de leur route avec son véhicule, c’était peine perdue. Les intrus avaient déjà coupé le grillage à la disqueuse, scié les arbres et arbustes pour ouvrir un large passage et y faire défiler véhicules et caravanes vers l’intérieur.
Jean-Benoît Pinturier raconte : « A l’entrée, plusieurs hommes faisaient passer les véhicules. Ils se sont approchés de moi de manière menaçante, très près. L’un d’eux me parlait à pas plus de cinq centimètres de mon visage en me disant ‘Dégage de là ou on va te crever…’ En quelques minutes je me suis retrouvé avec une cinquantaine de personnes qui tapaient sur ma voiture. J’ai dû reculer. Là, en un instant, j’ai eu peur pour ma vie. J’ai dû me réfugier dans ma voiture et j’ai appelé les gendarmes qui ont envoyé deux patrouilles mais ce ne sont que de petits moyens par rapport à ce qu’il faudrait employer. C’est un rapport de force… Ce groupe de gens du voyage est déjà venu ici durant l’été et s’était installé sur le stade au début des vacances scolaires. Ils ont traîné sur le secteur et dernièrement ont occupé illégalement un terrain à Fresnes-sur-Marne, commune de moins de cinq mille habitants dans notre intercommunalité qui a la compétence ‘gens du voyage’. On a pu faire une expulsion administrative. Depuis hier [ndlr : jeudi 5 octobre], ils ont essayé de se poser un peu partout, à Monthyon, à Othis… A Saint-Pathus, on en avait déjà récupéré une partie sur un terrain privé, juste en face de la Ferme de Noëfort. Ce sont des gens qui agissent en totale impunité. »
Une fois de plus, le maire se sent « abandonné par l’Etat », d’autant que devait être applicable une dérogation établie par la préfecture pour que les maires de communes de plus de cinq mille habitants et dont les intercommunalités n’étaient pas équipées d’une aire d’accueil puissent déposer plainte rapidement à la place des propriétaires privés.
Cependant, la dérogation en question n’a pas été établie et la préfecture se retranche derrière le fait que la CCPMF (communauté de communes Plaines et Monts de France) n’a pas d’aire d’accueil. Ainsi, les procédures d’expulsion prennent toujours des mois à aboutir et à faire exécuter.
Jean-Benoît Pinturier : « Nous avons un problème de fond qui est ingérable. La justice étant du côté de ces gens-là, on va mettre des mois à les faire évacuer. C’est un problème qui va au-delà de l’occupation du terrain car ça met un frein au développement de notre zone. Des investisseurs ont racheté les cellules et c’est en cours de commercialisation pour refaire des commerces et redynamiser l’ensemble. »
Le maire se sent désemparé. La communauté de communes s’était engagée à réaliser des jardins familiaux à la place d’une aire d’accueil qui « n’aurait servi à rien car on ne peut pas y mettre cent caravanes ». « Avant, c’était des petites familles, la loi correspondait aux cas mais elle date de trente ans et est obsolète. Les jardins familiaux, c’est pour aider les gens du voyage qui veulent se sédentariser et permettre d’apporter eau et électricité. On améliore les conditions petit à petit. La préfecture avait dit qu’elle nous considérait conformes au schéma départemental requis et que, par conséquent, on pouvait bénéficier d’une dérogation. Or la dérogation aurait dû être votée en ‘assemblée des gens du voyage’. Comme ça n’a pas été le cas et que les gens du voyage avaient un bon avocat, ce qui avait été signé par la préfecture n’était pas valable et ça a fait sauter toutes les dérogations prises sous cette forme-là. Ainsi la procédure qui permettait aux collectivités de se substituer aux propriétaires privés qui ont peur de déposer plainte en raison des menaces de représailles, n’est pas applicable. Administrativement et judiciairement parlant, je ne peux rien faire, à part aider les propriétaires. »
Saint-Pathus va devoir attendre, selon les estimations du maire, trois à quatre semaines pour avoir un jugement d’expulsion, et « on ne sait pas combien de temps » pour réussir à avoir les forces de l’ordre et faire exécuter le jugement.
« Il faut que l’Etat se réveille vraiment. Aujourd’hui, je fais un constat amer sur l’état de notre pays. Le manque de subventions, les fausses promesses, c’est insupportable et les gens du voyage, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. De nombreux autres maires font le même constat et c’est d’ailleurs pour ça que beaucoup démissionnent. »
Lundi 9 octobre, lors du conseil communautaire, l’ensemble des conseillers communautaires de Saint-Pathus ont fait part, dans une lettre, de l’urgence du problème et dont voici un extrait : « Ce que nous n’acceptons pas aujourd’hui, c’est d’être traités par les autorités préfectorales de manières différentes, à l’intérieur même de notre intercommunalité. Oui la loi impose que lorsqu’une commune possède plus de 5 000 habitants, celle-ci se doit d’être en conformité avec le schéma départemental, mais depuis plusieurs années maintenant, l’obligation n’est plus communale mais intercommunale. Or, en tentant de trouver une solution afin d’expulser les gens du voyage installés à Saint-Pathus, la préfecture nous a répondu qu’il était impossible pour le préfet de prendre un arrêté d’expulsion rapidement étant donné que nous n’étions plus en conformité avec le schéma départemental, de leur fait d’ailleurs puisque pour rappel la dérogation délivrée pour l’intercommunalité par la préfecture a mal été faite, ce qui a provoqué cet été l’annulation de celle-ci. Si la compétence est intercommunale, le traitement et les solutions apportées doivent être intercommunales. »
A Saint-Pathus, le maire regarde les caravanes passer et ronge son frein.