L’animal qui a été heurté par une voiture en forêt de Fontainebleau, mercredi 11 janvier, serait un loup gris. Des analyses pour préciser le type du « grand canidé » sont toujours en cours. S’il s’agit bien d’un canis lupus comme les critères morphologiques le montrent, il est possible qu’une meute ait prospéré dans le secteur ou que l’animal ait été isolé. L’affaire n’est pas une première en Seine-et-Marne.
L’animal heurté par une voiture à proximité du rond-point de la Libération, sur la départementale 607 qui traverse une partie de la forêt de Fontainebleau, serait visiblement un loup gris, canis lupus de son nom scientifique.
Le conducteur de la voiture, choqué, a été secouru par d’autres automobilistes, témoins de l’impact.
Un loup a-t-il été percuté par un automobiliste en forêt de Fontainebleau? pic.twitter.com/jhzuExvlwn
— BFM Paris Île-de-France (@BFMParis) January 13, 2023
Si l’observation des critères physiques laisse peu de place au doute, il faudra néanmoins confirmer le type de l’animal par les résultats d’analyses génétiques actuellement en cours et menées par l’OFB (Office français de la biodiversité). Par ailleurs, depuis plusieurs années, des signalements de loups dans le même secteur ont été enregistrés par les autorités, et plus particulièrement par l’Observatoire du loup.
Bruno Drevet, lieutenant de louveterie dans les Hautes-Alpes, un secteur où les loups ont été réintroduits et constituent dorénavant plusieurs meutes, indique : « Les analyses doivent permettre d’identifier avec précision le type d’animal. Il est extrêmement difficile, par exemple, de faire la différence entre un loup gris et un loup tchécoslovaque. »
Ce dernier est d’ailleurs catégorisé dans les chiens-loups domestiques, une race issue à l’origine d’un croisement entre un berger allemand et une louve des Carpates.
Toujours est-il que les multiples observateurs et experts animaliers tendent tous vers la piste du loup. Comment celui-ci est-il arrivé en forêt de Fontainebleau ? Etait-il un animal isolé ? Etait-ce un loup qui s’est extrait d’une meute, comme ils le font en arrivant à l’âge adulte pour créer leur propre groupe ? Si c’est le cas, la meute vit-elle dans le massif forestier de Fontainebleau particulièrement étendu avec ses 25 000 hectares ?
L’animal a tout aussi bien pu venir de loin. Les loups sont des animaux intelligents, observateurs et discrets. Ils peuvent parcourir jusqu’à trente kilomètres par jour et aller s’installer à quelque mille kilomètres de leur lieu d’origine.
Dans un communiqué concernant l’animal percuté, la préfecture de Seine-et-Marne fait état d’un « grand canidé ». Les descriptions de l’animal de la part de témoins orientent vers un même constat, c’est un loup : longues pattes, queue courte, masque facial clair, oreilles rondes…
La préfecture souligne : « Ce type d’observation fortuite et isolée peut survenir en automne-hiver. Elle ne permet pas d’affirmer que le loup est installé durablement en Seine-et-Marne. Les observations renvoient fréquemment à une étape importante du cycle biologique de l’espèce. En effet, les jeunes nés au printemps précédent prennent pleinement leur place au sein du groupe et contraignent d’autres individus à quitter la meute pour chercher un nouveau territoire. Ces individus peuvent parcourir plusieurs centaines de kilomètres. Ceci explique certaines observations isolées, loin des zones de présence permanente connues. La rapidité de déplacement et la discrétion de l’animal font que l’espèce peut facilement passer inaperçue. Il convient, à ce stade, de rappeler que le loup est une espèce protégée et qu’aucune attaque n’a été signalée dans notre département. »
Un loup capturé
entre Meaux et Dammartin-en-Goële
Ici et là, des loups sont signalés sur le territoire français, comme le 6 janvier en Bretagne, ou encore le 13 janvier où un autre loup a été tué par une voiture dans les Bouches-du-Rhône. En Seine-et-Marne, des habitants racontent encore l’histoire de deux loups qui ont sévi entre Meaux et Dammartin-en-Goële durant six mois, attaquant les élevages de moutons pour se nourrir. C’était en 1972. Toute la région était en émoi. Finalement, l’un des deux loups a été tué et enterré sans autre protocole par des habitants, et l’autre a été capturé par un agriculteur éleveur de moutons, Daniel Maurice, l’ancien maire de Gesvres-le-Chapitre. A l’époque, les pièges à renard étaient encore autorisés et, au mois de mars, après avoir semé la panique et tué des dizaines de moutons durant l’hiver, le loup s’est pris une patte dans l’un d’eux. Daniel Maurice raconte : « Il n’était pas blessé mais juste coincé. On a réussi à le dégager et je l’ai gardé dans un local de la ferme et puis je l’ai donné à un zoo qui m’a donné deux chèvres naines en échange… C’est terrible les dégâts que ça peut faire. En une seule nuit, dix de mes moutons ont été égorgés et éventrés. Ils attaquaient aussi des moutons à Marchémoret. C’était pour ainsi dire leur garde-manger… Quand les loups ont été mis hors d’état de nuire, tout est rentré dans l’ordre. Quand je l’ai capturé, j’ai bien vu que c’était un loup et pas un chien… »
La population de loups gris en France est estimée à 921 individus à la sortie de l’hiver 2021-2022.
Dents de berger allemand
Dents de canis lupus
Sur la D 607, en forêt de Fontainebleau