Les locataires du parc Corbrion, à Mitry-Mory, n’en peuvent plus. Depuis sept ans, ils passent leurs hivers sans chauffage. Les immeubles manquent d’entretien. Magjournal a rencontré les résidents, vendredi 29 janvier.
Bernard Berthonneau, président de la CNL (Confédération nationale du logement 77) du parc Corbrion, soulève les problèmes rencontrés par les habitants : « Cela fait maintenant sept ans que les locataires sont dans la même galère chaque hiver. Ils n’ont pas de chauffage, pas d’eau chaude ou sinon très peu. Certains ont relevé une température de 13 degrés seulement dans les chambres de leurs enfants ».
Une solution de dernière minute avait été proposée par Habitat77, l’office public qui gère les logements sociaux : le désembouage des canalisations. Bernard Berthonneau poursuit : « En 2018, le bailleur avait fourni des convecteurs électriques aux locataires concernés, mais il n’y en avait qu’un par logement, ce qui était insuffisant, surtout pour les appartements de type T4 ou T5. Et en plus, cela a fait exploser la facture d’électricité des ménages. Les locataires ont demandé le remboursement du surplus de charges mais Habitat 77 a répondu que cela ne pourra se faire que lorsqu’une décision de justice sera rendue. En attendant, les charges de chauffage sont suspendues depuis décembre. »
Une procédure a été engagée, il y a quatre ans, contre les maîtres d’œuvre, ce qui n’est pas une mince affaire puisque cela concerne le constructeur mais également de multiples sous-traitants. Des expertises ont été faites : le problème viendrait de malfaçons au moment de la construction, mettant en cause les canalisations qui génèrent de la boue. D’autres problèmes récurrents sont à déplorer : ainsi, les locataires du dernier étage constatent des infiltrations d’eau provenant de la toiture à chaque intempérie ; certains appartements en rez-de-chaussée, aménagés aux normes d’accessibilité pour PMR (personnes à mobilité réduite) sont régulièrement inondés, l’eau remontant par les douches à l’italienne.
Jamel Chebourou occupe un appartement, depuis 2013, rue Henriette Kerman. Depuis le début, il a des problèmes de chauffage et d’infiltrations par le toit. Maintes fois, il a signalé ses problèmes au bailleur : « A chaque fois, on me répond que quelqu’un va passer pour constater les dysfonctionnements mais personne ne vient. »
Aurélie Labbez a emménagé en 2017, au Chemin du Bout de la ville : « Comme la plupart des locataires ici, je n’ai pratiquement pas de chauffage et pour prendre une douche, il faut se lever à 5 heures du matin pour espérer avoir un peu d’eau chaude. J’ai réussi à obtenir deux radiateurs électriques du bailleur car mon appartement comporte un étage mais cela a fait grimper ma facture d’électricité de 500 euros. Je me suis plainte auprès d’Habitat77 mais on m’a répondu que si je n’étais pas satisfaite, je pouvais déménager et que beaucoup de gens attendaient derrière pour me remplacer. »
Aurélie dénonce aussi le manque d’entretien généralisé, comme le portail qui ne fonctionne plus depuis plusieurs mois et qui laisse libre accès au parking. Des personnes extérieures en profitent pour y garer leurs voitures : « Si les pompiers devaient intervenir, ils ne pourraient pas accéder car un seul battant du portail fonctionne. » Les allées extérieures ne sont plus éclairées, les lampes cassées ne sont pas remplacées et le soir venu, les locataires doivent accéder aux appartements dans la pénombre. « En ce qui concerne les halls d’entrée, ce n’est pas rassurant non plus. Les digicodes ne fonctionnent plus et des squatteurs s’y installent parfois pour la nuit ».
Bernard Berthonneau conclut : « Et dire qu’à la construction de ces logements, des panneaux photovoltaïques ont été installés sur les toits. Cela aurait pu pallier le manque de chauffage et d’eau chaude. » Le problème, c’est qu’ils n’ont jamais été branchés et n’ont donc jamais fonctionné.
De son côté, Habitat 77, organisme affilié au Conseil départemental, déclare : « Cette situation est dramatique et nous déployons tous nos moyens pour résoudre les problèmes. Dès 2014, plusieurs rapports de dysfonctionnement ont été établis lors de la prise en charge des installations et Habitat 77 a sollicité son assureur dommage-ouvrage, demande qui s’est soldée par un refus. Trois autres sollicitations ont suivi, en février 2016, pour dysfonctionnement du chauffage et de la distribution d’eau chaude, en octobre 2016, pour infiltrations des parties communes et des logements et, en janvier 2017, pour infiltrations dans les logements. Malgré l’engagement complet d’Habitat77 pour résoudre la situation, les dysfonctionnements perdurent. Pour trouver une solution définitive, l’office a saisi le juge administratif de Melun. Le juge a désigné un expert judiciaire en février 2018, lequel est chargé de décrire la nature et l’étendue des désordres, de fournir au juge les éléments d’évaluation sommaire des coûts des travaux nécessaires, de préciser les responsabilités encourues et les préjudices subis, et de donner son avis sur la conformité de l’installation dans les règles de l’art. La remise du rapport d’expertise est prévue fin juin 2021. En attendant, Habitat 77 a réalisé des travaux urgents en chaufferie et a réitéré une demande expresse de travaux, normalement impossibles en cours de procédure, pour le désembouage de l’ensemble des immeubles de la résidence Corbrion. L’autorisation a été donnée et les travaux ont débuté lundi 1er février, dans un premier temps par l’injection d’un produit de mise en suspension des boues pour désolidarisation du réseau. La durée d’action du produit est prévue pour trois semaines. Puis sera organisé le rinçage des radiateurs des logements. »