Les opposants au CDG Express ont assisté en nombre à la réunion publique avec le préfet de région proposée par la mairie de Mitry-Mory, à l’Atalante, lundi 18 février,
La salle était pleine, lundi soir. Le public était venu pour débattre du CDG Express avec le préfet de région ainsi que les divers intervenants liés au projet. Les travaux ont commencé et, chaque matin, le maire de Mitry-Mory, accompagné d’élus et d’anonymes, tente de faire stopper le chantier. Depuis, des CRS ont été déployés sur le terrain et certains parlent d’un « Notre-Dame-des-Landes seine-et-marnais ».
Les représentants de l’Etat ont présenté, lundi, le CDG Express et ses conséquences. Le maire, Charlotte Blandiot-Faride, indique : « Nous regrettons malgré tout que la rencontre ait été organisée après le lancement des travaux et la validation du projet par le ministre Elisabeth Borne… La volonté de l’Etat est de mettre œuvre le CDG Express contre l’avis du plus grand nombre ; la reconnaissance de l’existence d’impacts sur les transports du quotidien, particulièrement pendant la phase travaux ; l’impossibilité des autorités à répondre à la question fondamentale : à qui profite la nouvelle infrastructure et pourquoi persister avec entêtement dans cette voie, sinon pour servir la privatisation du groupe ADP et la volonté d’augmentation de sa valeur financière par un moyen de transport dédié et privé ? »
Le préfet de région, Michal Cadot, s’est retrouvé à débattre face à sept cents riverains et usagers du RER B. Il a déclaré : « Avant de vous présenter le CDG Express par l’intermédiaire des représentants et porteurs du projet, je tenais à vous dire que le transport au quotidien est la priorité pour notre région… Il y a eu un sous-investissement dramatique pendant vingt ans dans l’entretien de tous les modes de transport, que ce soit les routes ou le transport ferroviaire… Tout cela se paie aujourd’hui et on ne peut pas, en quelques mois ou quelques années, faire des travaux massifs pour rattraper le retard, que ce soit pour l’entretien, la modernisation ou la création de nouvelles lignes… Nous sommes dans une période où les crédits publics, ceux de l’Etat et de la Région principalement, ont doublé par rapport à la décennie précédente… Cela traduit la priorité mais il faut aussi faire des choix d’autres natures et j’entends parfaitement que le sujet du CDG Express entre dans les interrogations que vous allez développer ce soir ».
Jean-Louis Perrin, directeur général d’Ile-de-France mobilité, Denis Masure, directeur de la ligne B du RER, et Guillaume Marbach, directeur général d’Ile-de-France SNCF, ont commenté sur grand écran le Charles-de-Gaulle Express et ont abordé son programme, l’organisation de la circulation des trains, les grands travaux de l’axe nord, les principaux impacts des travaux pour les usagers du RER B, les enjeux environnementaux sur Mitry-Mory et le déroulement des travaux de 2019 à 2010 sur la ville.
Georges Poirette, Mitryen depuis quarante ans, ingénieur retraité d’ADP, a présenté à son tour un projet alternatif qu’il a élaboré et qui serait « moins coûteux et plus court en trajet que le CDG Express ». Ainsi a-t-il proposé une utilisation des équipements déjà existants, entre autre la ligne K et une navette bus jusqu’à l’aéroport Charles-de-Gaulle, pour un trajet revenant à 11, 40 euros pour l’usager contre 24 à 29 euros pour le CDG Express.
Pour rejoindre sa proposition, d’autres participants ont pris la parole à leur tour et les commentaires se sont élevés dans la salle : « Au lieu de dépenser une fortune dans un train qui ne sera pas rentable, il serait préférable de rénover la ligne B du RER. Vous n’avez pas compris la leçon, vous nous faites un OrlyVal bis. On va bosser sept à huit heures par jour et on passe trois heures dans les transports. Revoyez vos copies, on connaît l’histoire en tant que riverain ».
– J’ai une carte Améthyste et je prends le train le week-end car j’ai peu de moyens financiers et vous nous proposez un trajet Paris-Charles de Gaulle, entre 24 et 29 euros… Je nomme le CDG Express le train de la honte. J’ai pris dernièrement le RER B pour me rendre à un rendez-vous médical sur Paris et suite à un problème survenu sur la ligne, je suis arrivé trop tard. J’ai pris un autre rendez-vous mais dans trois mois… Je ne suis pas seul dans cette situation : des jeunes ont raté leur bac à cause de vous ».
– On ne peut pas se payer le ticket du CDG Express. Un bon gouvernement doit écouter, entendre les doléances des habitants avant de soumettre un projet. Cinq cent mille personnes disent non au CDG Express ; moi je ne dis pas non, je dis stop et fin ».
– J’habite près des lignes de chemin de fer et j’en subis déjà les nuisances. Avec les travaux du CDG Express, les camions vont nous bloquer, il sera difficile d’atteindre la Francilienne ainsi que Mitry-Bourg… Monsieur le préfet, j’espère que le message passera, que vous allez nous écouter. Nous avons proposé un projet alternatif ».
– En tant qu’élu, conseiller départemental de l’Aisne, je m’étonne. La ligne va supporter quatre natures de flux différents : le CDG Express, la ligne K, le TER et le fret. Cela va engendrer des problématiques et générer des retards ».
– Un grand nombre de suicides a été constaté sur la ligne B du RER. On nous refuse des emplois lorsque l’on dit que l’on utilise cette ligne, à cause des retards… Des gens ne sortent plus de chez eux à cause de la vétusté des transports. Mes enfants me demandent si l’on pourra encore aller à Paris le week-end ».
– La plupart des gens qui travaillent à Roissy habitent les environs et on a rien qui permette de rejoindre l’aéroport. La plupart des salariés prennent leur voiture. Que proposez-vous ? »
– Allez-vous arrêter le chantier ? Cela semblerait logique à la suite de ce débat, sinon c’est de l’enfumage ».
Le public a finalement réclamé un référendum.
Didier Le Reste, président de l’association Non au CDG Express, a posé la question qui hante les esprits : « Un train qui traverse une région sans s’arrêter : où est la valeur du CDG Express ? On va dégrader le transport ferroviaire pour satisfaire les touristes. Il y a une raison pour que l’Etat s’acharne à réaliser le CDG Express. Monsieur le préfet, y-a-t-il un lien avec le projet de privatisation de l’aéroport Charles-de- Gaulle ? » Michel Cadot, plutôt laconique sur le sujet, a répondu : « Il n’y a aucun lien avec la privatisation d’Aéroport de Paris ».
Avant de quitter la salle, Kamel Saïdi, habitant de Villeparisis, a confié : « J’ai trouvé le débat intéressant et constructif. Les gens ont pu s’exprimer mais je trouve dommage que l’on fasse mine de les entendre après que les décisions ont été prises malgré les oppositions faites depuis plusieurs années. C’est du f…age de g…le ! On veut nous vendre quelque-chose qui va à l’encontre de nos intérêts ».
Une délégation devrait se rendre, cet après-midi, vendredi 22 février, à la gare d’Aulnay-sous-Bois à la rencontre de Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France. Celle-ci, qui a prévu d’annoncer l’arrivée de nouvelles rames de train, a demandé à l’Etat de « détendre le calendrier du CDG Express ».
Le CDG Express est un train direct qui doit relier la gare de l’Est à l’aéroport Roissy Charles-de-Gaulle en vingt minutes, en empruntant vingt-quatre kilomètres de voies ferrées du Transilien, parallèles au RER B. Au niveau de Mitry-Mory, huit kilomètres de voies nouvelles devront être construites jusqu’à l’aéroport.
Elisabeth Borne, ministre des Transports, a donné son accord pour le début des travaux, le 28 janvier, alors que le maire de Mitry-Mory, Charlotte Blandiot-Faride, avait obtenu son approbation pour une concertation avant le début du chantier.