NATURE – Ils se déplacent en nombre, le soir avant de se coucher et le matin quand ils se réveillent. A Meaux, ils tournoient pendant de longs instants au-dessus de la place Lafayette. Dans les grands platanes dont la cime surplombe le parking, les étourneaux sansonnets – une espèce de passereaux appelés aussi étourneaux tout court ou bien sansonnets – ont élu domicile. Tous les soirs, les oiseaux offrent un spectacle impressionnant et si les bruits de la ville s’atténuent un court moment, on entend les plumes frémir dans le vent.
Dans le ciel, les étourneaux se déplacent par vagues. Il y a foule. Les mouvements se croisent, s’entrecroisent, s’allongent, tournoient, reviennent, se dédoublent, se regroupent. Le ballet est bien orchestré, personne ne se cogne. Pourtant il y en a des milliers, sans doute plusieurs centaines de milliers, au-dessus de la place et dont le vol s’étire jusqu’à la gare, puis la Marne, puis au-dessus de la voie ferrée, à peine… les sansonnets observent une limite à ne pas franchir.
Au soleil couchant, ce qu’ils veulent, c’est reprendre leur place sur les branches.
Les utilisateurs du parking en savent quelque chose : le sol est jonché d’excréments d’oiseaux. On marche comme sur un tapis de mousse, sauf que ce n’est pas de la mousse et que quand il pleut, ça se délaye… Et puis ça repeint les horodateurs, les toits des voitures et à l’occasion les épaules des automobilistes disciplinés qui vont payer leur place. Les fientes des étourneaux peuvent même endommager les « choses » sur lesquelles elles atterrissent à cause de l’acide urique qu’elles contiennent. Les étourneaux sansonnets sont aussi des vecteurs de réintroduction des acariens et autres nuisibles envahisseurs d’immeubles… car s’ils ne sont pas dans les arbres, ils peuvent s’imposer dans des recoins de bâtiments. Ils transmettent aussi des organismes nuisibles aux humains et aux stocks de produits frais.
Sous les arbres, place Lafayette, « C’est la nature » disent les plus « écolos ».
commente la grande majorité des passants, comme ce père de famille qui nettoie scrupuleusement les roues de la poussette de sa fille à l’aide d’essuir-tout avant de remettre le matériel dans le coffre de la voiture.
Jean-François Copé, le maire de la ville, avoue ne savoir que faire : « Qu’est-ce que vous voulez ? Qu’on abatte les arbres pour dissuader les oiseaux ? » Evidemment non… Quand les oiseaux – qui se sont on ne peut mieux adaptés au contexte urbain – logent sur des immeubles, l’exclusion est toujours la meilleure solution aux nuisances, en fermant les grandes ouvertures de diverses manières, pour éviter l’implantation des nids. Autrement dit on bouche les trous. Mais pour les arbres ? Comme pour les pigeons qui ont envahi le centre-ville, difficile de trouver une solution. Dans d’autres villes ou bien des campagnes où les étourneaux font des ravages dans les récoltes, on procède à des campagnes d’effarouchement.
Celles-ci consistent à effrayer les oiseaux pour les inciter à changer de dortoir en émettant des bruits, des sons impulsifs, intenses et surtout brefs. On utilise des fusées (crépitantes, sifflantes, détonantes), des effaroucheurs acoustiques (appareils émettant des cris de prédateurs et surtout – ils sont plus efficaces – des cris de détresse d’étourneau ou de geai), des fusils-laser. Des villes en Amérique du nord ont demandé le concours de la population pour taper sur des casseroles et déranger les oiseaux. Les méthodes d’effarouchement doivent être changées régulièrement car l’étourneau a une grande capacité d’adaptation. Rien n’est donc gagné d’avance.
Exemple d’une campagne d’effarouchement :
- 1er soir : quand il fait nuit noire, alors que les oiseaux sont prêts à dormir, on les réveille en faisant le plus de bruit possible ;
- 1er matin : avant le lever du soleil, on réveille les oiseaux et on les force à quitter le dortoir ;
- 2e soir : avant la tombée de la nuit et jusqu’à la nuit noire, on tente d’empêcher les oiseaux de venir se poser sur les arbres ;
- 2e matin : avant le lever du soleil, on réveille les oiseaux et on les force à quitter leurs dortoirs ;
- 3e soir : avant la tombée de la nuit et jusqu’à la nuit noire, on empêche les oiseaux de venir se poser sur les arbres (comme le jour précédent).
Plus récemment, certaines municipalités ont recours à l’effarouchement par des rapaces. En lien avec des fauconniers professionnels, la technique consiste à faire voler un oiseau de proie (le plus souvent une buse ou un faucon, plus rarement un vautour ou un épervier, selon l’espèce indésirable) afin de dissuader les nuisibles.
Le problème : Pour quel site vont-ils déménager ? Si l’opération fonctionne, les oiseaux partiront, mais où ? Peut-être encore plus près des habitations ?
Un coin de ciel s’ouvre quand on sait que l’étourneau sansonnet est partiellement migrateur. En hiver, les nuées déménagent pour le sud, en général le pourtour méditerranéen.
Une source de protéines : l’étourneau peut être consommé en pâté… Allez hop !