Ils y sont tous allés de leur couplet. Les politiques français, ceux dont la tête dépasse un peu du haut du panier, n’auraient manqué pour rien au monde la traditionnelle séance de vœux qu’ils se sentent chaque année obligés d’adresser aux Français de peur sans doute d’être projetés dans le gouffre de l’oubli .
Cette année, s’ils sont encore plus férus de la tradition, c’est qu’ils sont en pleine ligne droite pour la course à la présidence dont les élections auront lieu en 2017, s’investissant pour eux-mêmes ou pour les copains.
Evidemment, le soir du 31 décembre, le président Hollande a fait ses annonces télévisées et a mis l’accent – une fois de plus – sur le chômage. Le gouvernement Hollande prévoit en effet de former 500 000 chômeurs afin que ceux-ci puissent retrouver du travail. Joli calcul : pendant ce temps-là, ce sont autant de demandeurs d’emploi qui n’entreront plus dans la catégorie « qui fait peur » et surtout qui montre l’état catastrophique de la France tant les chiffres de « désemploi » sont élevés. Par contre, l’effort pour que les 500 000 demandeurs d’emploi soient formés coûtera la bagatelle d’un milliard d’euros et sera financé moitié par l’Etat et moitié par les fonds de la formation professionnelle. Nous voilà donc rassurés… Mais au fait, l’Etat, n’est-ce pas toujours quand même un peu l’argent des Français ? Toujours est-il que la mesure est concrète, dit-on, et présente, en premier lieu, des discussions avec les Régions, puisqu’en matière de formation, ce sont elles, et leurs nouveaux présidents – qui viennent d’être tous élus par leurs conseils respectifs, depuis lundi 4 janvier – qui détiennent les clés. C’est Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement qui l’a précisé sur RTL – Le Figaro – LCI. Ah, encore des discussions alors ? On se doute qu’on va aller vers des débats où certains vont comme par magie généreusement sortir de leurs poches quelques centaines de milliers d’euros, tandis que d’autres freineront, peut-être conscients que cracher au bassinet une fois de plus ne fera que rendre encore plus exsangues ces régions qui ne sont finalement financées que par l’argent des contribuables.
On l’aura compris, François Hollande est plus que jamais dans la course aux présidentielles ou peut-être prépare-t-il le terrain pour son chevalier noir, Manuel Valls. Toujours est-il que le président fait face à ce qui semblait être son premier adversaire, Nicolas Sarkozy, excepté que celui-ci est en train de se faire distancer par Alain Juppé. D’après un sondage Elabe pour BFMTV, c’est même lui qui serait le préféré des Français qui en majorité ne voient pas d’un bon œil un autre duel Hollande – Sarkozy. Le président, lui, se ferait devancer par Manuel Valls. Juppé aurait donc toutes ses chances, du moins pour l’instant. Il reste encore quelques mois jusqu’à l’échéance.
Alors Alain Juppé y est lui aussi allé de ses vœux aux Français. C’était le moment où jamais. Déjà il s’est positionné en chef, ou plutôt en papa, tandis qu’il a « félicité les Français » pour leur élan de solidarité et « l’expression d’un sursaut national » après que le pays a été frappé par les attentats. Alors on a gagné une bonne note sur notre carnet ? Par ailleurs, ce qui plaît peut-être aux électeurs, c’est de voir revenir ceux qui ont défrayé la chronique avec des emplois fictifs à la mairie de Paris (Juppé sous Chirac, maire de Paris, en 1998). Juppé aurait pour ainsi dire « servi de fusible ». Un peu comme Jean-François Copé pour Sarkozy dans l’affaire Bygmalion ? (Voir l’article du Figaro ici) On voit bien aussi Bernard Tapie – qui n’est cependant pas élu – revenir au-devant de la scène, et pas seulement comme acteur. Après ses longs tourments avec le Crédit lyonnais, une affaire qui remonte à 1993, l’homme d’affaires va devoir rembourser les sommes perçues lors de l’arbitrage de 2007 (Voir l’article des Echos ici). Au passage, Christine Lagarde, directrice générale du FMI, ancienne ministre de l’Economie, dans la même affaire, va devoir rendre des comptes devant la Cour de justice de la République (CJR) (Voir l’article de l’Express ici).
Et puis dans le désordre, il y a également eu les vœux de Cambadélis (PS), qui, comme dans la chanson de Gilbert Montagné, propose : « Aimons-nous… » ; il y a eu aussi Pierre Laurent (PCF) qui roule « pour les générations futures », Marine le Pen (FN) qui patiente, Raffarin (LR), l’ancien Premier ministre qui est gentil et puis la rigolote Nathalie Kosciusko Morizet (LR également), main dans la main avec le maire de Paris, Anne Hidalgo (PS) et qui s’est faite évincer de son poste de vice-présidente déléguée de son parti… Et il y a eu aussi tous les autres…
Heureusement que tout le monde a adressé des vœux à la population. N’est-ce pas là le plus important finalement et la morale de l’histoire ? Trinquons à la nouvelle année ou trinquons tout court.