Communiqué des personnels mobilisés du lycée Honoré de Balzac, mercredi 19 janvier –
Depuis le vendredi 14 janvier, quinze professeurs du lycée Honoré de Balzac (Mitry-Mory, Seine-et-Marne) ont fait usage de leur droit de retrait. Pour rappel, le droit de retrait est une procédure permettant à une personne de se retirer d’une situation de travail, lorsqu’elle estime que cette situation présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.
Même si la nature des risques peut varier en fonction des conditions de travail et de l’état de santé de chaque personne, le point commun des procédures engagées par nos collègues était le risque de contamination par le SARS-CoV-2, et des conséquences que celle-ci pouvait avoir sur leur santé.
Dès le 14 janvier, la direction du lycée a organisé une enquête, conformément aux procédures prévues par la loi, et y a associé des représentants du personnel. Cette enquête a consisté à étudier le danger décrit par chaque personnel, à vérifier l’existence de ce danger, et à étudier les mesures existantes ou manquantes pour y faire face. Un compte-rendu de l’enquête a ensuite été établi par la direction et transmis au rectorat. Pendant ce temps, les professeurs concernés ont commencé à s’organiser pour travailler à distance avec leurs élèves, en attendant que des mesures soient prises pour les protéger.
Lundi 17 janvier, en fin d’après-midi, presque tous les professeurs concernés ont reçu un courrier émanant de la direction des ressources humaines de l’académie de Créteil, leur demandant de reprendre leur service au lycée sous peine de retenues sur leur salaire.
Ce courrier pose problème à plusieurs titres :
– d’abord, nous constatons que les courriers reçus par nos collègues sont strictement identiques, et leur contenu ne correspond pas toujours aux dangers qu’ils ont signalés et aux problèmes qu’ils ont soulevés. Il s’agit donc d’une lettre-type envoyée à la chaîne par le rectorat, qui ne semble même pas avoir pris la peine d’étudier chaque situation comme il en a pourtant l’obligation. Elle émane d’ailleurs de la direction des ressources humaines, et ne fait apparaître l’intervention d’aucun service médical qui aurait la compétence pour juger du risque sanitaire. Une telle légèreté ne nous paraît pas à la hauteur de la situation, et témoigne d’une indifférence coupable à l’égard des personnels.
– ensuite, ce courrier n’annonce aucune mesure nouvelle pour écarter ou réduire les dangers signalés par les collègues, qu’il s’agisse de moyens matériels, de moyens humains, de modification du protocole sanitaire ou des conditions d’enseignement. Il se contente de décréter que le droit de retrait « ne trouve pas à s’exercer », autrement dit à nier les risques encourus par les personnels. Ce déni est inquiétant, même s’il n’est pas surprenant tant il caractérise le ministre lui-même depuis le début de la pandémie, ne pouvant que ruisseler dans l’administration qu’il dirige.
– Enfin, le principal argument avancé par ce courrier est d’affirmer que le protocole sanitaire établi par le ministère est mis en œuvre dans notre établissement. Ce qui est en partie faux, en raison de locaux sous-dimensionnés et de moyens humains insuffisants au regard du nombre d’élèves accueillis : il n’y a aucune limitation du brassage par niveau ; la promiscuité est importante dans les couloirs et dans la file d’attente du réfectoire ; la désinfection des surfaces ne peut pas être effectuée à la fréquence prévue ; le suivi des élèves contaminés ou cas-contacts, et la vérification des conditions de leur retour au lycée, sont difficiles… De plus, il faut rappeler qu’il s’agit du niveau 2 du protocole, sans qu’il ne nous ait jamais été expliqué quels critères déterminent le passage d’un niveau à l’autre. Il ne suffit donc pas de brandir l’existence d’un protocole pour que les personnels (tout comme les élèves et leurs familles) soient protégés : encore faut-il qu’il soit adapté, applicable et appliqué.
À nos collègues exerçant leur droit de retrait, l’État a finalement répondu comme il le fait en toute circonstance depuis le début de la pandémie : par le déni, le mensonge et le mépris. Nous y répondrons par la défense de chaque collègue cherchant à protéger sa santé, mais aussi par la mobilisation collective pour obtenir des mesures cohérentes et protectrices, et des moyens permettant d’assurer nos missions dans des conditions correctes !
C’est dans cet état d’esprit que nous prendrons part à la grève et aux manifestations prévues le jeudi 20 janvier, et à toutes les initiatives permettant de faire gagner nos revendications.