Communiqué de Charlotte Blandiot-Faride, maire de Mitry-Mory, mercredi 6 mai –
Monsieur le ministre, comme plus de trois cents maires franciliens, j’ai été signataire d’une lettre adressée à M. le président de la République demandant de repousser la réouverture des écoles à une date ultérieure au 11 mai et dénonçant le calendrier à marche forcée de ce déconfinement, dans des conditions sanitaires non garanties.
En cohérence, j’ai pris la décision en toute responsabilité de ne pas ouvrir les écoles maternelles et élémentaires le 11 mai et ai annoncé que le travail se poursuivrait pour envisager, dans la mesure où les conditions étaient réunies, une réouverture le 2 juin. En effet, au vu de l’absence d’informations quant aux effectifs de professeurs disponibles et au nombre d’enfants accueillis, et dans l’attente encore à ce jour des recommandations qui nous été promises pour les activités périscolaires, nous ne pouvions assurer aux personnels et élèves les conditions de sécurité sanitaire indispensables dans cette période.
Or, j’apprends aujourd’hui par le biais de l’inspection d’académie qu’aucun professeur ne sera plus disponible pour assurer l’accueil et la scolarité des enfants des personnels soignants mitryens, comme de tous ceux considérés comme personnels indispensables à la gestion de la crise. C’est une remise en cause brutale de l’engagement du président de la République dans son allocution du 12 mars selon laquelle l’Education nationale accueillera les enfants des professionnels, qui n’ont pas d’autre choix, et dont la profession figure sur une liste arrêtée par vos services.
Je reste dans l’attente, comme je l’ai demandé, d’un courrier qui confirmera par écrit cette décision opportunément annoncée par seule voie orale. Car je ne peux m’empêcher de voir ici un honteux lien de cause à effet. Je vous rappelle que
ma décision de maintenir les écoles fermées, hormis celle dont l’ouverture est assurée depuis le 16 mars, ne vise qu’à assurer la protection de la population conformément à mes responsabilités de maire. J’aurais osé espérer que nous travaillions de concert avec vos services dans ce même et unique but.
Aussi, je trouve proprement indigne de me voir annoncer une dégradation des dispositifs qui doivent assurer cette sécurité. Une décision d’autant plus scandaleuse qu’elle utilise, aux fins de sanction des collectivités qui vous alertent sur le manque de réalisme du calendrier imposé, les personnels considérés « prioritaires » dont les enfants ne pourront plus être accueillis. Ceux-ci sont déjà contraints à des sacrifices anormaux, travaillant au contact de publics à haut risque malgré la pénurie des matériels de protection, faisant face à l’angoisse de transmettre à leurs familles un virus qui continue de faire des centaines de victimes quotidiennes dans notre pays et tout particulièrement dans notre région, toujours classée en zone rouge.
Alors que les habitants et professionnels se mobilisent, souvent bénévolement, pour pallier aux manquements d’un service public de santé méthodiquement affaibli par plusieurs décennies d’une gestion comptable aveugle, une telle annonce ne fait que signer la constance du mépris dont votre gouvernement fait preuve à l’égard, particulièrement, de nos personnels soignants, et la profonde hypocrisie des hommages que vous prétendez leur rendre au moment où les catastrophes sanitaires vous rappellent leur utilité.
D’autre part, si vous ne disposez pas même des effectifs qui permettent d’assurer l’accueil des enfants de ces personnels, par quel miracle pensez-vous assurer la présence de ces mêmes enseignants dans les classes que vous prétendez rouvrir quoi qu’il en coûte ? Le respect des délais arbitrairement fixés par le plan de communication du président de la République constituerait-il un objectif prioritaire à l’assurance de la sécurité sanitaire des élèves, enseignants, agents des services publics locaux, personnels soignants et, à travers eux, de la population ?
M. le ministre, l’annonce qui m’est faite aujourd’hui est indigne de votre fonction et des responsabilités qu’elle engage. La présence des enseignants qui accueillent les enfants des personnels prioritaires doit être assurée avant toute autre chose et ne peut sous aucun prétexte constituer le moyen d’un chantage inacceptable.
Dans l’attente de la réponse écrite qui me confirmera au plus vite le maintien de la présence de ces enseignants, je vous prie d’agréer, Monsieur le ministre, l’expression de mes sentiments indignés.