Plus d’un an après l’adoption de la « loi nitrites » à l’Assemblée nationale et huit mois après la confirmation par l’ANSES du lien entre risque de cancer et exposition aux nitrites et nitrates via la viande transformée, le gouvernement a annoncé son plan d’action concernant sujet particulièrement sensibles concernant les nitrites ajoutés dans la charcuterie. Près d’un demi-million de consommateurs réclament l’interdiction des additifs E249, E250, E251 et E252 par le biais de la pétition lancée en 2019 par foodwatch, Yuka et la Ligue contre le cancer. foodwatch, Yuka et la Ligue contre le cancer ont pris connaissance du plan d’action au ministère de l’agriculture, lundi 27 mars, et dénoncent « la frilosité du gouvernement qui se contente surtout de réductions sur base d’engagements volontaires des industriels ».
Les autorités publiques n’ont pas pris de décision règlementaire pour interdire les nitrites/nitrates ajoutés. Jusqu’à quatre mille nouveaux cas de cancers par an liés à la consommation de viande transformée pourraient être évités en interdisant les additifs dans notre alimentation et ainsi appliquer le principe de précaution inscrit dans la Constitution rappellent foodwatch, la Ligue contre le cancer et Yuka.
Alors que l’Etat s’était engagé en juillet 2022 à faire en sorte que « la santé des consommateurs français soit l’unique boussole du gouvernement dans l’analyse de l’ensemble des données et la prise de recommandations », foodwatch et la Ligue contre le cancer estiment que le compte n’y est pas pour protéger la santé avec le plan révélé aujourd’hui ; et ce malgré l’avis de l’ANSES confirmant « l’existence d’une association positive entre l’exposition aux nitrates et/ou aux nitrites via la viande transformée et le risque de cancer colorectal » plus de trente fois dans le rapport, et la mobilisation d’un demi-million de signatures sur la pétition pour interdire les additifs, une mission parlementaire et une proposition de loi.
Karine Jacquemart, directrice générale de foodwatch, déclare : « C’est un plan d’action frileux qui évoque la diminution voire la suppression des additifs nitrés sur certains aliments mais qui, en fait, ne les interdit pas. Pire, le gouvernement semble tout à fait à l’aise de donner encore à l’industrie et aux lobbies de la charcuterie quelques années supplémentaires alors que le ‘sans nitrites’ existe déjà sur le marché. Des milliers de cancers pourraient être évités chaque année en France. Il n’y a pas de dose acceptable de risque de cancer dans notre alimentation. »
« Après une reconnaissance par l’Anses du lien positif entre l’exposition aux nitrites et le cancer colorectal et après des tractations qui durent depuis 2019, nous ne pouvons-nous satisfaire du plan tel qu’il est rédigé. Alors que nous demandons l’interdiction des nitrites et nitrates dans la charcuterie, le plan propose « une trajectoire de baisse ambitieuse de l’utilisation des nitrites/ nitrates », ce qui ressemble furieusement à la position de la Fédération française des charcutiers et traiteurs (Fict) qui déclare s’inscrire « dans une trajectoire permanente de réduction » des nitrites. La confiance que nous pouvions avoir initialement sur le traitement de ce dossier a été largement entamée. », affirme le Pr Daniel Nizri, président de la Ligue nationale contre le cancer.
« Nous déplorons que le gouvernement cède au lobby de la charcuterie industrielle au détriment de la santé des consommateurs », ajoute Julie Chapon de Yuka.
Concrètement, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau et la ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé Agnès Firmin Le Bodo, ont discrètement publié le 27 mars en fin de soirée un plan d’action en trois phases qui reconnaît le problème sur certains aliments en évoquant une baisse souhaitée, voire une suppression. « Le plan d’action ne contient pas d’engagements assez forts pour la suppression des additifs concernés et repose sur les engagements volontaires de l’industrie. De plus, il accorde un sacré répit à l’industrie pour davantage de recherches et développement, utiles mais ici utilisés aussi manifestement pour gagner du temps – et en faire perdre aux mesures nécessaires pour protéger la santé publique. Par ailleurs, le plan creuse les inégalités entre une population qui aura les moyens d’acheter de la charcuterie sans nitrites et des populations plus pauvres, qui de ce fait, seront encore une fois délaissées et les plus exposées au risque de cancer », dénoncent foodwatch, la Ligue contre le cancer et Yuka.