La limitation de la vitesse à 80 km/h suscite des débats enflammés en France, car ce qui impacte la mobilité a des répercussions sur la vie quotidienne.
Les routes conditionnent l’accessibilité des territoires et donc leur cohésion, le lien social, l’insertion. Le débat sur les 80 km/h dépasse le cadre de la simple préoccupation de sécurité routière, pourtant bien légitime. Tout est ici rassemblé pour déchaîner les passions. Un an après l’entrée en vigueur des 80 km/h, qu’en pensent les Français ?
Entre mai et juin 2019, Quel-assureur.com a réalisé une enquête sur le sujet auprès de 1 822 conducteurs Français.
Le mécontentement envers les 80 km/h s’est exacerbé en un an
Pour rappel, 84% des Français étaient défavorables au passage de la loi en 2018. Le désaccord envers cette mesure du gouvernement Philippe s’accentue en 2019 pour atteindre 88% de mécontentement.
La fronde grandissante est peut-être due au fait d’avoir réellement éprouvé la mesure durant un an, car 3/4 des Français ont une route à 80 km/h sur leur trajet domicile-travail. Et les communes rurales où les déplacements sont davantage nécessaires sont en tête de la grogne. L’opposition aux 80 km/h y est 8% plus importante que dans les villes.
Le désaccord influence-t-il pour autant la conduite des Français ? Respectent-ils malgré tout la limitation sur les routes concernées ? Plus de la moitié des conducteurs restent soucieux de la vitesse à adopter pour rouler en toute légalité. Mais près de 1/4 de nos compatriotes confessent se soucier rarement de cette réglementation. Et 1/5 avouent même s’en moquer totalement. Une vitesse davantage acceptée aurait-elle tendance à être mieux respectée ? La question mérite d’être posée.
Des radars sur les tronçons à 80 km/h, une double peine
On ne peut pas nier les conséquences de la vitesse. La mise en service des radars à bien fait diminuer la mortalité sur certains tronçons. Mais est-ce pour autant la bonne solution de réduire la vitesse ? L’expérience danoise fournit un contre-exemple de poids : on mourrait moins sur une route à 90 km/h que sur une route à 80 km/h.
Sous cet angle, l’aspect contrôle-sanction dans les zones à 80 km/h est-il toujours pertinent ? Pour les conducteurs, un radar sur une route à 80 km/h semble s’apparenter à une double peine. 12% d’entre eux ont eu une amende pour excès de vitesse sur l’une de ces portions. Et les 3/4 de ces amendes sanctionnent une vitesse qui n’excède pas les 90 km/h ! On peut alors comprendre une certaine frustration vis-à-vis de la limitation de vitesse en place depuis un an.
Un agacement d’autant plus perceptible lorsque 87% des Français pensent que la plupart des radars sont disposés de manière à piéger les automobilistes. Les radars fixes raflent la moitié du palmarès des flashs au-dessus de 80 km/h. Ceux de la police et de la gendarmerie représentent 29% des sanctions pour ce type d’excès de vitesse.
Quelles pourraient être les alternatives aux 80 km/h ?
Il est évident que la vitesse au volant entraîne des problèmes de sécurité routière. Pour remédier à cela sans garder la mesure des 80 km/h telle qu’elle est, les Français ont des solutions en tête.
81% d’entre eux ont la conviction que des routes mieux entretenues résoudraient en grande partie le problème. Plus de 3/4 de la population pense que cette limitation de vitesse ne devrait concerner que les jeunes conducteurs et les seniors. Plus de la moitié des Français souhaitent que la vitesse soit ajustée en fonction de la particularité de chaque route. L’idée d’un éthylotest anti-démarrage obligatoire pour les jeunes conducteurs et celle d’augmenter le nombre de routes éclairées séduisent près de 30% de nos concitoyens.
L’exécutif, lui, hésite encore sur la position à adopter et se tourne vers les parlementaires. Une délégation de la décision de maintien ou non des 80 km/h a été votée par les députés, jeudi 6 juin. Les présidents des conseils départementaux ainsi que certains maires auront la possibilité de déroger à la limitation à 80 km/h entrée en vigueur en juillet 2018. Mais ces derniers rebondissements ne devraient pas pour autant clore un dossier aussi complexe et polémique.