Après la mort de Nahel, tué par un policier à Nanterre (Hauts-de-Seine), dans la matinée de mardi 27 juin, les émeutes ont pris des proportions incontrôlables et touchent de plus en plus de villes, grandes comme petites. La Seine-et-Marne n’est pas épargnée par les violences urbaines. Le week-end arrive et les maires craignent pour leurs communes comme pour la population et les commerces vandalisés par les émeutiers. Ce soir, vendredi 30 juin, les municipalités lancent leurs recommandations dictées par les préfectures.
Le week-end et les nuits prochaines inquiètent les autorités et particulièrement les maires. Dans les grandes comme les petites villes, les émeutiers ont laissé libre cours à la violence de rue depuis qu’un policier a tiré sur Nahel (17 ans), qui se trouvait au volant d’une voiture, et l’a tué. Poubelles incendiées, voitures retournées et brûlées, commerces pillés, aucune ville n’est épargnée par les violences et les agissements de ceux que le maire d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), Bruno Beschizza, qualifie de « petits prédateurs » : Vaires-sur-Marne, Chelles, Pontault-Combault, Montereau, Lieusaint, Le Mée…
A Meaux, le quartier de Beauval a été particulièrement ciblé dans la nuit de jeudi 29 à vendredi 30 juin. Les commerces du centre commercial de la Verrière ont subi les assauts des pilleurs.
Un témoin, habitant du quartier, raconte : « C’était entre minuit et 4 heures du matin. On les voyait sortir du magasin, les bras chargés d’objets et faire le tri avec les cartons de cigarettes. Il y avait des jeunes mais aussi des adultes. Ils avaient des sacs et ils prenaient le temps de trier. On n’a pas vu la police qui devait certainement être déjà occupée ailleurs. »
Le lendemain, à 14 heures, le maire, Jean-François Copé, est venu constater les dégâts et soutenir les commerçants. Il déclare : « Je suis indigné de voir que des jeunes de 12, 13, 14 ans, cassent notre belle ville, que les parents sont absents alors qu’ils devraient s’en occuper. J’appelle vraiment les parents à se mobiliser. On ne peut pas faire ça tout seuls et il va bien falloir que les gens réagissent pour protéger notre ville. Nous prenons des mesures policières à la suite des faits, des mesures de répression, de prévention. On va tout mettre en place et, dès ce soir, les transports vont s’arrêter à partir de 21 heures. »
Pendant ce temps, des commerçant réparaient leurs vitrines et rideaux en métal éventrés par les vandales. L’un des propriétaires se lamente : « Comment on peut faire ? Si on fait appel à l’assurance pour les réparations, on sera étranglés financièrement car la franchise est trop élevée. »
La chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Seine-et-Marne se mobilise aux côtés des commerçants et vient de mettre en place une cellule de crise pour les soutenir et les aider. (Contact : CCI de Seine-et-Marne)
Ce soir à La Verrière, la police municipale va être renforcée.
« Les dégradations commises
dans notre ville sont scandaleuses »
A Monthyon, village de 1 800 habitants, toujours dans la nuit de jeudi à vendredi, les gendarmes de Saint-Soupplets ont dû intervenir pour interpeller des fauteurs de trouble.
Stéphane Devauchelle, le maire de Saint-Soupplets, commente : « Je suis solidaire de mes collègues maires qui subissent ces éléments intolérables. Nous sommes dans une république et logiquement on ne devrait pas être confrontés à ça. Je ne porterai aucun commentaire concernant le drame de mardi matin. Toutefois, les gendarmes de Saint-Soupplets sont intervenus à Monthyon cette nuit où ils ont été pris à partie. La gendarmerie de Dammartin a été attaquée. J’exprime mon profond soutien aux forces de l’ordre, tant à la gendarmerie qu’à la police nationale, à la municipale, et aux pompiers qui interviennent au péril de leur vie, parfois dans des conditions compliquées… La brigade de Saint-Soupplets fait preuve d’un investissement total au profit de nos administrés. »
A Dammartin-en-Goële, la brigade de gendarmerie a essuyé des tirs de mortier.
A Villeparisis, des émeutes ont aussi secoué la ville : poubelles incendiées principalement le long de la rue Jean-Jaurès, caméras de vidéos protection endommagées, la Maison pour tous et le conservatoire partiellement incendiés, commerces vandalisés, voitures brûlées, intrusions dans des bâtiments publics… Le maire, Frédéric Bouche, « assure de son soutien les commerçants et les particuliers victimes de ces actes inadmissibles : « Cette nuit et tôt ce matin, nos services sont intervenus dans un contexte difficile et tendu pour limiter les dégradations sur notre patrimoine, puis pour nettoyer au mieux nos espaces publics… J’appelle notre jeunesse au calme, au respect d’autrui et du bien commun. »
A Noisiel, l’ancien commissariat de police nationale, le poste de police municipale, la mairie annexe ainsi que le Carrefour City ont été pris pour cible, attaqués au mortier et au cocktail Molotov. Le maire, Mathieu Viskovic, témoigne : « Le poste de police municipale a fait l’objet d’une attaque en règle, ainsi que la mairie annexe. J’étais à l’intérieur du bâtiment. Je peux témoigner de la violence de cette attaque. Le courage et le sang-froid des policiers municipaux, avec le renfort de policiers nationaux, ont permis de repousser les assaillants… La colère est mauvaise conseillère et les dégradations commises dans notre ville sont scandaleuses, inqualifiables et inexcusables. »
Tous les spectacles, petits et grands, ont été annulés, Mylène Farmer au stade de France (Seine-Saint-Denis), les représentations du spectacle historique à Meaux, des concerts et spectacles en Ile-de-France, aux « booms » de fin d’année des CM2.
La Première ministre, Elisabeth Borne, et le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, se sont rendus à Évry-Courcouronnes (Essonne), dans un poste de police touché par les émeutes dans la nuit du 29 au 30 juin. La Première ministre a annoncé que « le gouvernement allait étudier les réponses juridiques à donner… » Le ministre de l’Intérieur a demandé aux préfectures d’interdire « systématiquement » la vente et le transport de mortiers d’artifice, de bidons d’essence, d’acides et de produits inflammables et chimiques.
Les transports publics s’arrêteront dans tout le pays au plus tard à 21 heures, après trois nuits d’émeutes urbaines.
Les autorités engagent les habitants à limiter les déplacements et à rester chez eux dans la mesure du possible, à ne sortir les poubelles que le matin du jour de la collecte, à rentrer les voitures quand c’est possible…