AU TRIBUNAL –
Agression sexuelle : Léa*, 7 ans, a été agressée sexuellement par l’ami de son père. Elle est aujourd’hui âgée de 16 ans mais n’était pas là, lundi 3 octobre, dans la salle d’audience à Meaux, pour voir la justice être rendue.
Léa est en fugue… Le procès a cependant eu lieu, sans l’adolescente.
C’est en 2010 que la petite fille, alors âgée de 10 ans, en a parlé pour la première fois tandis que les faits remontaient en 2007. Craignant la réaction de son père, souvent rude, Margot s’est confiée à ses « cousins », comme elle appelait les enfants de son père et de sa belle-mère. Ceux-ci ont rapporté l’histoire à leur mère, qui a fini par en parler au père de Léa. Lui et sa fille sont allés faire une déposition au commissariat.
L’histoire fait froid dans le dos : Léa s’était rendue chez Silvestro, un ami de son père sensé la garder. Il connaissait bien la petite fille mais l’accueil que lui réservait Silvestro fait plonger dans le sordide.
L’homme a invité la fillette à le rejoindre sur le canapé. Elle n’a pas compris et est allée dans sa chambre, dormir. Ce sont les attouchements que Silvestro lui a fait subir qui ont réveillé Léa un peu plus tard dans la soirée. Il ne cessera qu’après lui avoir bandé les yeux et lui avoir fait toucher « quelque chose qui ressemblait à de la peau », d’après le témoignage de la petite fille lu par le juge du tribunal correctionnel, lundi.
« Qu’était Léa pour vous? » lançait le juge, Silvestro répondant par un déstabilisant « Je l’adorais, elle était faible, elle ne parlait pas bien ». Deux psychologues ont en effet discerné un retard intellectuel chez l’enfant, expliquant les années de redoublement à l’école et les mots que la petite victime a utilisés pour décrire les scènes qu’elle a vécues.
Elle était évidemment fragile, sa mère souvent absente. La fillette craignait son père et à l’époque des faits, elle était sur le point d’être placée dans un foyer. Décrite par les magistrats, la salle d’audience imaginait aisément la victime. Elle était en manque d’affection, influençable, vulnérable face à un adulte dominant. L’avocate de Léa a expliqué : « De par son âge et son intelligence, son histoire ne peut mentir. Et même s’il n’y a pas de preuves ADN de son agression, Léa s’en est toujours tenue à la même version et n’a jamais montré une tendance à la fabulation ». En effet, la fillette a utilisé lors de ses témoignages ses mots à elle, ses mots d’enfants.
Face aux magistrats, le prévenu s’éparpille dans ses propos, ne trouve pas ses mots, répond par l’incompréhension. Silvestro, sans emploi fixe, est un homme au passé chaotique. Il affirme s’être fait agresser sexuellement quand il était encore enfant en Italie. Il est arrivé en France à 14 ans, se plaignant de ne pas avoir su trouver ses marques.
Il a déjà été condamné deux fois à une peine d’incarcération. C’est d’ailleurs lors de sa deuxième condamnation qu’il a rencontré Philippe, le père de Léa. Les deux hommes sont restés en bons termes après leur sortie de prison… jusqu’au moment où Philippe a demandé à Silvestro de lui garder 75 000 euros. Bon copain, Silvestro a aussitôt accepté et, comme d’aucun pouvait s’y attendre, n’a pas rendu l’argent quand Philippe le lui a demandé. C’est l’histoire que le prévenu a délivrée pour plaider la non culpabilité concernant les attouchements sur la petite Léa. « Il veut se venger de l’affaire des 75 000 € » a-t-il essayé de faire croire aux juges, lundi.
Le jour suivant l’appel qu’il a reçu de la brigade de protection de l’enfance, alors que celle-ci n’avait fait aucune référence à Léa, Silvestro s’est enfui pour l’Italie. « Voilà un fait qui est pratiquement un aveu. De plus, il l’a dit lui-même, il n’a pas pu regarder l’enfant dans les yeux quand il l’a revue pour que les forces de l’ordre relèvent les deux témoignages », a commenté le procureur adjoint.
L’avocate de Léa a demandé 5 000 euros en dommages et intérêts et le procureur a requis trois ans de prison dont un an avec sursis. Silvestro a finalement été condamné à deux ans de prison dont un an avec sursis.
« On ne sait pas dans quel état est Léa, en espérant qu’elle apprenne la condamnation et qu’elle en sera soulagée » a ponctué l’avocate de la victime.
*Le prénom a été changé.